Louis XIV
Le Code Noir
de l’Amerique Françoise
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OUIS, par la
grâce de Dieu, Roy de France & de Navarre: A tous
présens & à venir: S A L U T, comme nous devons
également nos soins à tous les Peuples que la Divine
Providence a mis sous notre obéissance, Nous avons bien voulu
faire examiner en notre presence les mémoires qui nous ont
été envoyez par nos Officiers de nos Iles de l’Amerique,
par lesquels ayant été informé du besoin qu’ils
ont de notre Autorité & de notre Justice pour y maintenir la
discipline de l’Eglise Catholique, Apostolique & Romaine, pour y
regler ce qui concerne l’Etat & la qualité des Esclaves
dans nosdites Iles, & désirant y pourvoir & leur
faire connoître qu’encore qu’ils habitent des climats infiniment
éloignez de notre séjour ordinaire, nous leur sommes
toujours present, non seulement par l’érendue de notre
puissance, mais encore par la promptitude de notre application à
les secourir dans leurs nécessités.
A ces causes, de l’avis de notre Conseil, & de notre certaine science,
pleine puissance & autorité Royale, nous avons dit,
statué & ordonné, disons, statuons & ordonnons,
voulons & nous plaît ce qui ensuit.
Article I. Voulons & entendons que l’Edit du feu Roy de glorieuse mémoire, notre très-honoré Seigneur & Pere, du 23 avril 1615, soit executé dans nos Iles; ce faisant, enjoignons à tous nos Officiers de chasser Isles tous les Juifs qui y ont établi leur résidence, ausquels, comme aux ennemis déclarés du nom Chrétien, Nous commandons d’en sortir dans trois mois, à compter du jour de la publication des presentes, à peine de confiscation de corps & de biens.
II. Tous les Esclaves qui seront dans nos Isles seront baptisez & instruits dans la Religion Catholique, Apostolique & Romaine. Enjoignons aux Habitants qui acheteront des Negres nouvellement arrivez d’en avertir les Gouverneur & Intendant desdites Isles dans huitaine au plus tard, à peine d’amende arbitraire, lesquels donneront les ordres nécessaire pour les faire instruire & baptiser dans le tems convenable.
III. Interdisons tout exercice public d’autre Religion que de la Catholique, Apostolique & Romaine; voulons que les contrevenans soient punis comme rebelles & désobéissans à nos Commandemens. Défendons toutes assemblées pour cet effet, lesquelles nous déclarons conventicules, illicites & séditieuses, sujets à la même peine; qui aura lieu, même contre les Maîtres qui les permettront ou souffriront à l’égard de leurs Esclaves.
IV. Ne seront préposez aucuns Commandeurs à la direction des Negres, qui ne fassent profession de la Religion Catholique, Apostolique & Romaine, à peine de confiscation desdits Negres contre les Maîtres qui les auront préposés, & de punition arbitraire contre les Commandeurs qui auront accepté ladite Direction.
V. Défendons à nos Sujets de la religion R. P. R. d’apporter aucun trouble ny empêchement à nos autres Sujets, même à leurs Esclaves, dans le libre exercice de la Religion Catholique, Apostolique & Romaine, à peine de punition exemplaire.
VI. Enjoignons à tous nos Sujets, de quelque qualité & condition qu’ils soient, d’observer les jours de Dimanche & Fêtes qui sont gardez par nos Sujets de la Religion Catholique, Apostolique & Romaine. Leur défendons de travailler, ny faire travailler leurs Esclaves esdits jours, depuis l’heure de minuit, jusqu’à l’autre minuit, foit à la culture de la terre, à la manufacture des Sucres, & à tous autres ouvrages, à peine d’amende & de punition arbitraire contre les Maîtres, & de confiscation tant des Sucres que desdits Esclaves qui seront surpris par nos Officiers dans le travail.
VII. Leur défendons pareillement de tenir le marché des Negres & de tous autres marchez lesdits jours, sur pareilles peines, & de confiscation des marchandises qui se trouveront alors au marché, & d’amende arbitraire contre les Marchands.
VIII. Déclarons nos Sujets qui ne sont pas de la Religion Catholique, Apostolique & Romaine, incapables de contacter à l’avenir aucuns mariage valable. Déclarons bâtards les enfans qui naîtront de telles conjonction, que nous voulons être tenus & réputez, tenons & réputons pour vrais concubinages.
IX. Les hommes libres qui auront eu un ou plusieurs enfans de leur concubinage avec leusr Esclaves, ensemble les Maîtres qui l’auront souffert, seront chacun condamnez à une amende de deux mille livres de sucre & s’ils sont les Maîtres de l’Esclave de laquelle ils auront eu lesdits enfans, voulons, qu’outre l’amende, ils seront privez de l’Esclave & des enfans, & qu’elle & eux soient confisquez au profit de l’Hôpital, sans jamais pouvoir être affranchis. N’entendons toutefois le present article avoir lieu lorsque l’homme n’étoit point marié à une autre personne durant son concubinage avec son Esclave, épousera dans les formes observées par l’Eglise sadite Esclave, qui sera affranchie par ce moyen, & les enfans rendus libres & légitimes.
X. Lesdites solennitez prescrites par l’Ordonnance de Blois articles 40, 41, 42 & par la Déclaration du mois de Novembre 1639, pour les mariages, seront observées tant à l’égard des personnes libres que des esclaves, sans néanmoins que le consentement du pere & de la mere de l’esclave y soit nécessaire, mais celui du Maître seulement.
XI. Défendons aux Curez de procéder aux mariages des esclaves, s’ils ne font apparoir du consentement de leurs Maîtres. Défendons aussi aux Maîtres d’user d’aucunes contraintes sur leurs esclaves pour les marier contre leur gré.
XII. Les enfans qui naîtront des mariage entre esclaves seront esclaves, seront esclaves & appartiendront aux Maîtres des femmes esclaves, & non à ceux de leurs marié, si le mari & la femme ont des Maîtres differens.
XIII. Voulons que si le mari esclave a épousé une femme libre, les enfans, tant mâles que filles suivent la condition de leur mere, soient libres comme elle, nonobstant la serviture de leur pere, & que, si le pere est libre & la mere esclave, les enfans seront esclaves pareillement.
XIV. Les Maîtres seront tenus de faire mettre en Terre Sainte dans les Cimetieres destinez à cet effet, leurs esclaves baptisez: & à l’égard de ceux qui mourront sans avoir reçu le baptême, ils seront enterrez la nuit dans quelque champ voisin du lieu où ils seront décedez.
XV. Défendons aux esclaves de porter aucunes armes offensives, ny de gros bâtons, à peine du fouet, & de confiscation des armes au profit de celui qui les trouvera saisis; à l’exception seulement de ceux qui seront envoyez à la chasse par leur Maîtres, & qui seront porteurs de leurs billets, ou marques connues.
XVI. Défendons pareillement aux esclaves appartenant à differens Maîtres, de s’attrouper, foit le jour ou la nuit, sous prétexte de noces ou autrement, soit chez un de leurs Maîtres ou ailleurs, & encore moins dans les grands chemins ou lieux ecartez, à peine de punition corporelle, qui ne pourra être moindre que du fouet & de la fleur de lys en cas de fréquentes récidives & autres circonstances aggravantes, pourront être punis de mort: ce que nous laissons à l’arbitrage des Juges. Enjoignons à tous nos Sujets de courir sus aux contrevenans, & de les arrêter & conduire en prison, bien qu’ils ne soient Officiers & qu’il n’y ait contr’eux encore aucun decret.
XVII. Les Maîtres qui seront convaincus d’avoir permis ou toléré telles assemblées composées d’autres esclaves que de ceux qui leur appartiennent, seront condamnez en leur propre & privé nom, de réparer tout le dommage qui aura été fait à les voisins à l’occasion desdites assemblées, & en dix écus d’amende pour la première fois, & au double en cas de récidive.
XVIII. Défendons aux esclaves de vendre des cannes de sucre, pour quelques causes ou occasion que ce soit, même avec la permission de leur Maître, à peine du fouet contre les esclaves, de dix livres tournois contre leurs Maîtres qui l’auront permis, & de pareille amende contre l’acheteur.
XIX. Leur défendons aussi d’exposer en vente au marché ni de porter dans les maisons particulieres pour vendre aucunes sorte de denrées, même des fruits, légumes, bois à brûler, herbes pour leur nourriture, & des bestiaux à leurs manufactures, sans permission expresse de leurs Maîtres, par un billet, ou par des marques connues, à peine de revendication des choses ainsi vendues, sans restitution de prix par leurs Maîtres, & de six livres tournois d’amende à leur profit contre les acheteurs.
XX. Voulons à cet effet que deux personnes soient préposées par nos Officiers dans chacun marché, pour examiner les denrées & marchandises qui seront apportées par les esclaves, ensemble les billets & marques de leurs Maîtres.
XXI. Permettons à tous nos Sujets habitans des Isles, de se saisir de toutes les choses dont ils trouveront les esclaves chargez lorsqu’ils n’auront point les billets de leurs Maîtres, ni de marques connues, pour être rendues incessamment à leurs Maîtres, si leur habitations son voisines du lieu où leurs esclaves auront été surpris en délit: sinon elles seront incessamment envoyées à l’Hôpital pour y être en dépôt jusqu’à ce que les Maîtres en ayent été avertis.
XXII. Seront tenus les Maîtres de fournir par chacune semaine à leurs esclaves âgez de dix ans & au-dessus pour leur nourriture, deux pots & demi mesure du pays de farine de Magnoc, ou trois cassaves pesans deux livres & demie chacun au moins ou choses équivallans, avec deux livres de boeuf fallé ou trois livres de poisson ou autres choses à proportion, & aux enfan, depuis qu’ils sont sevrez jusqu’à l’âge de dix ans la moitié des vivres cy-dessus.
XXIII. Leur défendons de donner aux esclaves de l’eau de vie de canne guildent, pour tenir lieu de la subsistance mentionnée en precedent article.
XXIV. Leur défendons pareillement de se décharger de la nourriture & subsistance de leurs esclaves, en leur permettant de travailler certain jour de la semaine pour leur compte particulier.
XXV. Seront tenus les Maîtres de fournir à chacun esclavé, par chacun an deux habits de toile ou quatre aulnes de toile au gré desdits Maîtres.
XXVI. Les esclaves qui ne seront point nourris, vêtus & entretenus par leurs Maîtres, selon que nous l’avons ordonné par ces Presentes, pourront en donner avis à notre Procureur, & mettre leurs mémoires entre ses mains, sur lesquels & même d’office, si les avis lui en viennent d’ailleurs, les Maîtres seront poursuivis à sa Requeste & sans frais; ce que nous voulons être observé pour les crieries & traitemens barbares & inhumains des Maîtres envers leurs esclaves.
XXVII. Les esclaves infirmes par vieillesse, maladie, ou autrement, soit que la maladie soit incurable ou non, seront nourris & entretenus par leurs Maîtres, & en cas qu’ils les eussent abandonnez, lesdits esclaves seront adjugez à l’Hôpital, auquel les Maîtres seront condamnez de payer six sols par chacun jour pour leur nourriture & entretien de chacun esclave.
XXVIII. Déclarons les esclaves ne pouvoir rien avoir qui ne soit à leur Maître, & tout ce qui leur vient par industrie ou par la liberalité d’autres personnes ou autrement à quelque titre que ce soit, être acquis en pleine proprieté à leur Maîtres, sans que les enfans des esclaves , leurs Pere & Mere, leurs parens & tous autres libres ou esclaves, puissent rien prétendre par succession, disposition entre vifs ou à cause de mort, lesquelles dispositions nous déclarons nulles, ensemble toutes les promesses & obligations qu’ils auront faites , comme étant faites par gens incapables de disposer & contracter de leur chef.
XXIX. Voulons néanmoins que les Maîtres soient tenus de ce que les esclaves auront fait par leur ordre & commandement, ensemble de ce qu’ils auront géré & négocié dans les boutique, & pour l’espece particuliere de commerce à laquelle les Maîtres les auront préposez: ils seront tenus feulement jusqu’a concurrence de ce qui aura tourné au profit des Maîtres; le pécule desdits esclaves que leurs Maîtres leur auront permis en sera tenu, après que leurs Maîtres en auront déduit par préférence ce qui pourra leur en être dû, sinon que le pécule consistat en tout ou partie en marchandises, dont les esclaves auront permission de faire trafic à part, sur lesquels leurs Maîtres viendront seulement par contribution au sol la livre avec les autres créanciers.
XXX. Ne pourront les esclaves être pourvus d’Offices ni de Commission ayant quelques fonctions publiques, ni être constituez agens par autres que leurs Maîtres, pour agir & administrer aucun négoce ni être arbitre, en perte, ou témoins, tant en Matiere Civile que Criminelle & en cas qu’ils soient ouys en témoignage, leurs déposition ne servirent que de mémoires, pour ayder les Juges à s’éclaireir d’ailleurs, sans que l’on puisse tirer aucune présomption ni conjecture ni adminicule de preuve.
XXXI. Ne pourront aussi les esclaves être parties, ni en Jugement ni en Matiere Civile, tant en demandant que défendant, ni être Partie Civile en Matiere Criminelle, & de poursuivre en Matiere Criminelle la réparation des outrages & excès qui auront été commis contre leurs esclaves.
XXXII. Pourront les esclaves être poursuivis criminellement, sans qu’il soit besoin de rendre leurs Maîtres partie, sinon en cas de complicité: & seront lesdits esclaves accusez, jugez en premiere Instance par les Juges ordinaires, & par appel au Conseil Souverain sur la même instruction, avec les mêmes formalitez que les personnes libres.
XXXIII. L’esclave qui aura frappé son maître, sa maîtresse ou le mari de sa maîtresse, ou leurs enfants avec contusion ou effusion de sang, ou au visage, sera puni de mort.
XXXIV. Et quant aux excès & voies de fait qui serons commis par les esclaves contre les personnes libres: Voulons qu’ils soient severement punis, même de mort, s’il y échet.
XXXV. Les vols qualifiez, même ceux de chevaux, cavalles, mulets, boeufs & vaches, qui auront été faits par les esclaves, ou par ceux affranchis, seront punis de peines afflictives; même de mort si le cas le requiert.
XXXVI. Les vols de moutons, chevres, cochons, volailles, cannes de sucres, poix, maignoe ou autres légumes faits par les esclaves, seront punis selon la qualité du vol, par les Juges, qui pourront, s’il y échet, les condamner à être battus de verges par l’Executeur de la Haute, Justice, & marquez à l’épaule d’une fleur de Lys.
XXXVII. Seront tenus les Maîtres en cas de vol ou autrement des dommage causez par leurs esclaves, outre la peine corporelle des esclaves, réparer le torts en leur nom, s’ils n’aiment mieux abandonner l’esclave à celui auquel le tort a été fait, ce qu’ils seront tenus d’opter dans trois jours, à compter du jour de la condamnation, autrement ils en seront déchus.
XXXVIII. L’esclave fugitif qui aura été en fuite pendant un mois à compter du jour que son Maître l’aura dénoncé en Justice, aura les oreilles coupées, & sera marqué d’une fleur de lys fur une épaule; & s’il récidive un autre mois à compter pareillement du jour de la dénonciation, aura le jarret coupé & il sera marqué d’une fleur de lys sur l’autre épaule, & la troisième fois il sera puni de mort.
XXXIX. Les affranchis qui auront donné retraite dans leurs maisons aux esclaves fugitifs, seront condamnez par corps envers leurs Maîtres en l’amende de trois cens livres de sucres par chacun jour de rétention.
XL. L’esclave puni de mort sur la dénonciation de son Maître , non complice du crime pour lequel il aura été condamné, sera estimé avant l’exécution par deux des principaux habitats de l’Isle, qui seront nommez d’office par le Juge, & le prix de l’estimation sera payé au Maître; pour à quoi satisfaire, il sera imposé par l’intendant sur chacune tête de Nègre payant droit, la somme portée par l’estimation, laquelle sera reglée sur chacun desdits Nègres, & levée par le Fermier du Domaine Royal d’Occident, pour éviter à frais.
XLI. Défendons aux Juges, à nos Procureurs & aux Greffiers, de prendre aucune taxe dans les Procès Criminels contre les esclaves, à peine de concussion.
XLII. Pourront pareillement les Maîtres, lorsqu’ils croiront que leurs esclaves l’auront mérité, les faire enchaîner & les faire battre de verges ou de cordes, leur défendant de leur donner la torture, ni de leur faire aucune mutilation de membre, à peine de confiscation des esclaves, & d’être procedé contre les Maîtres extraordinairement.
XLIII. Enjoignons à nos Officiers de poursuivre criminellement les Maîtres ou les Commandeurs qui auront tué un esclave sous leur puissance ou sous leur direction, & de punir le Maître selon l’atrocité des circonstances; & en cas qu’il y ait lieu à l’absolution, permettons à nos Officiers de renvoyer tant les Maîtres que les Commandeurs absous, sans qu’ils ayent besoin de nos graces.
XLIV. Déclarons les esclaves être meubles, & comme tels entrent en la communauté, n’avoir point de suite par hypoteque, & partager également entre les cohéritiers, sans préciput, ni droit d’aînesse, n’être sujets au Douaire Coutumier, au Retrait Féodal & Lignager, aux Droits Féodaux & Seigneuriaux, aux formalitez des Decrets, ni au retranchemens des quatre Quints, en cas de disposition à cause de mort & testamentaire.
XLV. N’entendons toutefois priver nos Sujets de la faculté de les stipuler propres à leurs personnes & aux leurs de leur côté & ligne, ainsi qu’il se pratique pour les sommes de deniers & autres choses mobiliaires.
XLVI. Dans les saisies des esclaves, seront observées les formalitez prescrites par nos Ordonnances & les Coutumes pour les saisies des choses mobiliaires. Voulons que les deniers en provenant soient distribuez par ordre de saisies; & en cas de déconfiture, au sol la livre, après que les dettes privilegiées auront été payées, & généralement que la condition des esclaves soit reglée en toutes affaires, comme celles des autres choses mobiliaires aux exceptions suivantes.
XLVII. Ne pourront être saisis & vendus séparément le Mari, la femme & leurs enfans impuberes, s’ils sont tous sous la puissance d’un même Maître, déclarons nulles les saisies & ventes qui en seront faites, ce que nous voulons avoir lieu dans les alienations volontaires, sur peine que seront les alienateurs d’être privez de celui ou de ceux qu’ils auront gardez, qui seront adjugez aux acquereurs, sans qu’ils soient tenus de faire aucun supplément du prix.
XLVIII. Ne pourront aussi les esclaves travaillant actuellement dans les sucreries, indigoteries & habitations, âgez de 14 ans & au dessus jusqu’à soixante ans, être saisis pour dettes, sinon pour ce qui sera dû du prix de leur achat, ou que la sucrerie ou indigoterie ou habitation dans laquelle ils travaillent, soient saisis réellement; défendons à peine de nullité, de proceder par saisie réelle & adjudication par decret sur les sucreries, indigoteries ni habitations, sans y comprendre les esclaves de l’âge susdit y travaillant actuellement.
XLIX. Les Fermiers Judiciaire des sucreries, indigoteries ou habitations saisies réellement conjointement avec les esclaves, seront tenus de payer le prix entier de leur bail, sans qu’ils puissent compter parmi les fruits & droits de leur bail qu’ils percevront les enfans qui seront nez des esclaves pendant le cours d’icelui qui n’y entrent point..
L. Voulons que nonobstant toutes conventions contraires que nous déclarons nulles, que lesdits enfants appartiennent à la partie saisie si les créanciers sont satisfaits d’ailleurs, ou à l’adjudicataire s’il intervient un d’ecret, &, qu’à cet effet mention des esclaves décedez depuis la saisie réelle dans laquelle ils auront été compris., il sera fait mention dans la dernière affiche, avant l’interposition du décret, desdits enfants nés esclaves depuis la saisie réelle; que dans la même affiche il sera fait des esclaves décédez depuis la saisie réelle dans laquelle ils éntaient compris.
LI. Voulons, pour éviter aux frais & aux longueurs des procdeures, que la distribution du prix entier de l’adjudication conjointement des fonds & des esclaves & de ce qui proviendra du prix des Baux judiciaires, soit faite entre les Créanciers selon l’ordre de leurs privileges & hypoteques, sans distinguer ce qui est provenu du prix des fonds d’avec ce qui est procedant du prix des esclaves.
LII. Et néanmoins les droits Féodaux & les Seigneuriaux ne seront payez qu’à proportion du prix des fonds.
LIII. Ne seront reçus les Lignagers & les Seigneurs Féodaux à retirer les fonds décretez, s’ils ne retirent les esclaves vendus conjointement avec les fonds, ni les adjudicataires à retenir les esclaves sans les fonds.
LIV. Enjoignons aux Gardiens Nobles & Bourgeois, Usufruitiers, Admodiateurs & autres jouissans des fonds, ausquels sont attachez des esclaves qui travaillent, de gouverner lesdits esclaves comme bons peres de famille, sans qu’ils soient tenus après leur administration finie, de rendre le prix de ceux qui seront décedez ou diminuez par maladies, vieillesse ou autrement sans leur faute, & sans qu’ils puissent aussi retenir comme les fruits de leurs profits, les enfans nez desdits esclaves durant leur administration, lesquels nous voulons être conservez & rendus à ceux qui en sont les Maîtres & Proprietaires.
LV. Les Maîtres âgez de vingt ans pourront affranchir leurs esclaves par tous actes entre vifs ou à cause de mort, sans qu’ils soient tenus de rendre raison de leur affranchissement, ni qu’ils ayent besoin d’avis de parents, encore qu’ils soient mineurs de vingt cinq ans.
LVI. Les enfans qui auront été fait légataires universels par leurs Maîtres, ou nommez Executeurs de leurs Testaments, ou Tuteurs de leurs enfans, seront tenus & réputez, & les tenons & réputons pour affranchis.
LVII. Déclarons leurs affranchissements faits dans nos Isles, leur tenir lieu de naissance dans nos Isles & les esclaves affranchis n’avoir besoin de nos Lettres de naturalité, pour jouir des avantages de nos Sujets naturels dans notre Royaume, Terres & Pays de notre obéissance, encore qu’ils soient nez dans les Pays Etrangers.
LVIII. Commandons aux affranchis de porter un respect singulier à leurs anciens Maîtres, à leurs Veuves & à leurs Enfans, ensorte que l’injure qu’ils auront faite soit punie plus grièvement que si elle étoit faite à une autre personne: les déclarons toutefois francs & quittes envers eux de toutes autres charges, services & droits utiles que leurs anciens Maîtres voudroient prétendre, tant sur leurs personnes, que sur leurs biens & successions en qualité de Patrons.
LIX. Octroyons aux affranchis les mêmes droits, privilèges & immunitez dont jouissent les personnes nées libres; voulons qu’ils méritent une liberté acquise, &qu’elle produise en eux, tant pour leurs personnes que pour leurs biens, les mêmes effets que le bonheur de la liberté naturelle cause à nos autres Sujets.
LX. Déclarons les confiscations & les amendes, qui n’ont point de destination particuliere par ces presentes, nous appartenir, pour être payées à ceux qui sont préposez à la recette de nos revenus. Voulons néanmoins que distraction soit faite du tiers desdites confiscations & amendes au profit de l’Hôpital établi dans l’Isle où elles auront été adjugées.
Notes
- Par la grâce de Dieu, Roy de France & de Navarre by the grace of God, King of France & of Navarre.
- Esclaves. Slaves.
- Maîtres. Masters.
Page prepared by:
- Arthur Assamoi
- Daniel Bankard
- Kevin Fontenot
- Bruce R. Magee
- Charles Sprague
- Jacob Williams
Source
Louis XIV. Le Code Noir ou Edit du Roy, Servant de Reglement Pour le Gouvernement & l’Administration de Justice & la Police des Isles Françoises de l’Amerique, & pour la Discipline & le Commerce des Negres & Esclaves dans ledit Pays.: Donné à Versailles au mois de Mars 1685. Avec l’Edit du mois d’Aoust 1685. portant établissement d’un Conseil Souverain & de quatre Sieges Royaux dans la Coste de l’Isle de S. Domingue. Paris: Au Palais, 1735. Web. 27 Feb. 2012. <http://archive.org/ details/ le code noir ouedi00 fran>.